Missionnaire entre deux mondes
Régulièrement, dans cette page, Alain Sorba parle des prisons, les décrit de l’intérieur, et témoigne parfois aussi du travail d’aumônier. Il aborde aujourd’hui le thème de la « mission de l’Église ».
©PiIxabay-Lionel Allorge
Le thème des prochains synodes est celui de la mission de l’Église et des ministères. Celui d’aumônier de prison en fait partie et c’est aussi le moment de s’interroger sur sa nature, sa pertinence, son existence même… Nous aurons certainement l’occasion dans les prochains mois de nous attarder sur ce sujet et de l’approfondir. Mais aujourd’hui, mon intention est d’élargir le regard que nous y portons, de façon naturelle et spontanée.
L’aumônier : missionnaire de l’Église dans les prisons
Souvent, lorsque nous échangeons avec d’autres aumôniers sur les motivations de notre engagement, plusieurs font référence au texte de Matthieu 25, verset 35 et suivants. C’est l’élan naturel de celui qui veut vivre en cohérence avec l’Évangile auquel il croit. Mais après cet élan initial, d’autres motivations émergent dans le discours et je puiserai dans le « Florilège de textes sur la mission de l’Église », mis à notre disposition sur le site de l’EPUdF par les rapporteurs au prochain synode régional, deux citations :
- « La question théologique du “lieu” de l'Église conduit à l'affirmation fondamentale et commune : l'Église est là où la Parole de Dieu la fait naître. »1
- « La mission, c’est l'Église envoyée dans le monde, pour aimer, servir, prêcher, enseigner, guérir et libérer. »2
Oui, lorsque nous visitons les personnes détenues, lorsque nous célébrons avec elles le culte, nous formons Église et l’intensité de la communion que nous vivons dans ces lieux est presque toujours accueillie par les aumôniers comme un cadeau.
Oui, même si nous passons plus de temps à écouter qu’à parler, lorsque nous intervenons, c’est pour contribuer à la guérison et pour aider à la libération.
L’aumônier : missionnaire de la prison dans les Églises
Mais si les quelques mots qui précèdent peuvent, très succinctement, définir notre ministère, ils ne sont cependant pas suffisants à rendre compte d’un autre aspect de notre mission. Cet autre versant de notre travail ne peut être comparé au précédent, il n’en demeure pas moins important : permettre, comme observateur de la vie carcérale, de nourrir la réflexion de la société civile, de chaque citoyen sur le sens de la peine - au plus large. Car comme citoyen, membre d’une communauté nationale, nous avons la responsabilité d’améliorer dans tous les secteurs de la vie la justice et la paix.
La peine carcérale en fait partie, mais comment se forger une idée plus juste, en dehors des clichés habituels, si l’information est presque inexistante ?
Depuis le début de l’année, l’aumônerie protestante des prisons apporte sa contribution à cette meilleure connaissance en éditant un blog sur le site de Regards Protestants (https://regardsprotestants.com/partenaires/jap/) dans lequel vous pourrez lire des témoignages, des analyses, des réflexions, et recueillir des statistiques… à propos de ce monde tout proche de nous, qui fait partie intégrante de notre société, même si nous préférons souvent l’ignorer.
1. Gérard Delteil, Paul Keller, L’Église disséminée, Paris, Cerf, 1995, p. 94-95.
2. David Bosch, Transforming Mission : Paradigm Shifts in Theology of Mission, Maryknoll, NY, Orbis Books,1991.
