Année Luther… (8)

Luther et la « Messe allemande »

01 avril 2017

En 2014, l’Unesco inscrit les « Deutsche Messe und Ordnung Gottesdiensts », avec treize autres écrits de Luther, au patrimoine mondial. Dans l’exposé de ses motifs, l’Unesco souligne l’importance de ces écrits venus d’un mouvement religieux et sociétal qui a influencé la religion, la politique, la culture et la société jusqu’à aujourd’hui.

À travers ces écrits, la relation de l’homme vis-à-vis de Dieu a été revisitée et on peut trouver des répercussions à tous les niveaux de la vie humaine. Messe allemande est l’appellation d’un culte qui, suite à la Réformation, essaie d’établir un déroulement en allemand suivant la messe médiévale, tout en prenant en considération ce qui est cher à la Réformation : retour aux sources bibliques, suppression de tout ce qui fait allusion à une théologie du sacrifice, Cène sous les deux espèces pour tous les participants d’un culte. 

Une prédication en langue allemande
Luther commence par les cultes quotidiens. Les formules latines sont remplacées par les lectures et la prédication est faite en langue vernaculaire. Dans sa « Formula missae » (1523), il supprime déjà le caractère sacrificiel, mais il garde le latin. La Réformation a privilégié l’autorité biblique à celle de la hiérarchie ecclésiale. Selon la doctrine catholique, la messe c’est le sacrifice, les bonnes œuvres et le mérite, tandis que Luther souligne pour la Cène la manifestation de la grâce de Dieu comme bénéfice et don. Pour concevoir le culte, les réformateurs sont partis du déroulement de la messe. Ils n’ont pas voulu la supprimer, mais l’adapter consciencieusement et la revaloriser. La conviction du sacerdoce universel a conduit notamment les réformateurs à établir le culte en allemand, pour que chacun puisse comprendre son contenu. Très vite après la Réformation, des théologiens proches des pensées réformatrices ont essayé de changer le contenu de la messe. À partir de 1522, différentes propositions ont été éditées. On y trouve des parties changées, traduites en allemand ; d’autres ont été supprimées.

La cène sous les deux espèces
©wikimedia

Des chants en allemand
En 1526, Luther a édité sa « Deutsche Messe und Ordnung Gottesdiensts » (Messe allemande et ordre du culte). Au début, cet ordre du culte a été pensé pour les villages et les petites villes n’ayant ni école latine ni université. Dans la préface, il évoque un culte de maison, pour ceux qui veulent être des chrétiens « sérieux ». À la différence des autres propositions, Luther remplace les chants latins par des chants en allemand. Pour cela il les traduit ou il crée des chants en allemand pour le culte, pour les différents temps liturgiques et pour l’année ecclésiale. La prédication re-trouve sa place prépondérante pendant le culte et, en ce qui concerne la liturgie de la Cène, Luther supprime l’offertoire et la prière après le sanctus pour privilégier l’institution. Comme cette proposition était trop radicale, elle n’a pas pu être adoptée. Beaucoup de déroulements luthériens du culte ont été établis dans la foulée et sont un mélange entre la « Formula missae » et la « Messe allemande ».

Christine URBAN
pasteure à Saint-Étienne

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