Solidarité migrants

Juste derrière la frontière

01 février 2017

Caritas (le secours catholique italien) Vintimille accueille une partie de ces réfugiés économiques et politiques qui, au risque de leur vie, partent de chez eux pour une vie meilleure, espèrent-ils, en Europe. Il avait lancé un appel pour des vêtements chauds, chaussures, sacs à dos, duvets, et des produits alimentaires pour les enfants. L’Entraide protestante de La Ciotat, épaulée par la paroisse d’Aubagne, a dit « oui » pour participer à cette action, sans mesurer à quoi cela mènerait. Témoignage.

Nous pensions obtenir quelques sacs qui finiraient par remplir le coffre d’une 207. Pour être sûrs de remplir ce coffre, nous avions décidé d’ouvrir deux jours : un mardi, jour de l’accueil organisé par l’Entraide de La Ciotat, et un vendredi soir. Une autre collecte était prévue au temple d’Aubagne. Et nous avions demandé à nos connaissances de diffuser l’information autour d’eux. Il suffit d’un clic ou deux sur son ordi pour que la surprise advienne : le nombre de clics nous a complètement surpris et disons-le franchement fait chaud au cœur.

Une chaîne de solidarité

Au départ, nous voulions porter nos sacs au collectif d’Aix qui avait relayé l’appel, et regroupe la Cimade, le Secours catholique, l’Entraide protestante, Habitat et citoyenneté… Mais dépassé par les afflux de dons, il a refusé catégoriquement de recevoir les nôtres. Il nous fallait donc aller à Vintimille. Grâce à un enchaînement de bonnes volontés et de bras, le samedi 28 octobre à 6 h 30 nous partions à cinq : une fourgonnette et ses deux chauffeurs, et une voiture avec les responsables de l’Entraide et moi-même comme reporter.

Arrivés à Vintimille, nous nous sommes perdus, et avons vu sur les routes autour de Vintimille des Africains, souvent par petits groupes, allant et venant on ne savait où. Nous avons fini par trouver le camp de la Croix rouge, signalé par une immense bâche, le long de la voie ferrée. La police était là. Il fallait montrer patte blanche pour avoir le droit d’entrer.

Deux ruches bourdonnantes

Un camp peu large, s’étendant sur des centaines de mètres, constitué de baraques aux façades opaques, coté route… Étions-nous à l’aise à la porte du camp ? Non. Que se passait-il à l’intérieur, quelles histoires, quelles traversées épiques, dramatiques ? Dans un silence qui tranchait avec le nombre d’habitants que nous supputions à l’intérieur, allaient et venaient de jeunes Africains. Je n’ai pas pris de photo de ce camp, car prendre une photo, est-ce du voyeurisme ou de l’information ? Aujourd’hui, je sais que si je me retrouve dans une situation similaire, je prendrai des photos pour partager et informer.

Nous avons repris la route, et enfin avons trouvé Caritas-Vintimille. Cette grande maison paraît bien petite à l’égard du travail immense qui s’y passe. Autour d’immeubles très hauts, des serres à flanc de montagne, le train, la montagne, un pont, un viaduc, des rues plus ou moins défoncées. De jeunes Africains d’Érythrée, d’Éthiopie, du Soudan, du Mali, du Ghana entrent et sortent. Dans quelques minuscules bureaux se gère la situation de chacun. Et puis derrière une porte c’est l’infirmerie, et derrière une autre les provisions, et dans un immeuble, les appartements. Nos sacs disparaissent dans d’autres salles où ils seront triés par genre : pulls, manteaux, chaussures… Puis par taille. Puis distribués. Une jeune femme, qui ne veut pas être prise en photo, trie du matin au soir, du lundi au samedi matin.

Caritas a besoin en permanence de nos dons, tant les besoins sont immenses : d’une trentaine de personnes par semaine il y a un an, ils étaient passés, en octobre, au rythme d’une centaine de personnes par semaine qui demandaient leur aide.

Impressionnants bénévoles

À 300 mètres de là, à l’église San Antonio, Caritas gère un camp de transit. Illégal en soi, accepté tout de même, car sur une propriété privée : celle de l’Église catholique. Des femmes seules avec enfants de moins de 6 ans, ou des hommes seuls avec enfants, ont le droit de s’y installer pour trois à cinq jours pour souffler, se reposer, se faire soigner. Un bénévole d’Emmaüs, chargé de mettre au point une stratégie pour qu’Emmaüs France et Italie puissent aider Caritas efficacement, nous accueille. Tout est dans les soubassements de l’église : la cuisine, les réserves, les dortoirs hommes et femmes avec des lits superposés, une infirmerie, une école, une grande cour où sèche le linge et où les migrants vont prendre leur repas.

Sur un mur près de la cuisine, les bénévoles s’inscrivent pour les tâches quotidiennes à accomplir. Et il en faut du monde pour, jour après jour, assurer courses, repas, vaisselle… Toujours ce même calme, ce silence, toujours cette discrétion, de la part des migrants.

Et ce n’est pas fini…

Dans la rue, les Italiens côtoient ces êtres en partance, sans animosité. Les habitants confrontés à une réalité qui les dépasse s’organisent et gèrent, et aident. Ils ont besoin de nous. Les bénévoles italiens sont sur le pont 24 h sur 24. Est-ce que les villes frontalières françaises pourraient proposer leur aide pour les soulager le week-end : cuisiner, mettre la table, débarrasser… ? Maintenant ils demandent aussi de la nourriture. La Ciotat-Aubagne a envoyé un nouveau convoi fin janvier, mais les besoins changent tout le temps. Si votre Entraide veut y aller, assurez-vous de ce qui est nécessaire.

En savoir plus

Contact :
Christian ou Marise, de Caritas-Vintimille, qui parlent français.
Tél. : +39 1 84 35 50 58

Sabine TOULAS
La Ciotat

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