L’autre et moi – 10 –

Fiançailles

07 novembre 2020

Il est des mots que nous n’employons presque plus. Et pourtant dans la relation de l’autre et moi, ils prennent tout leur sens comme fondateurs du couple.

Le mot fiançailles contient la délicatesse de la main dans une autre, la promenade dans les herbes folles au printemps, la caresse de la brise océane. Malgré leur même finale sonore, l’univers des épousailles est radicalement opposé et évoque les ripailles, la table garnie, le vin consommé et les grivoiseries. Le temps des fiançailles précède toujours, et aujourd’hui encore, celui du mariage sans en avoir le nom. Le duo sort ensemble, puis glisse vers une installation commune sans savoir toujours indiquer formellement le début d’une vie partagée au quotidien. Et pourtant nommer cette étape préliminaire en fiançailles permettait de la formaliser, de la dater, de la symboliser souvent par un anneau et une rencontre parentale intime lors d’un repas de bon aloi.

Les fiancés avancent main dans la main à destination du mariage (© Domaine public)

 

Le temps de la rencontre

Les fiancés pouvaient dès lors avancer en plein jour la main dans la main dans un compte à rebours vers la destination du mariage, autour duquel les familles s’affairaient. Les baisés volés laissaient la place à une digne promenade dans la rue principale ou sur les grands boulevards. La relation amoureuse était officialisée et annonciatrice d’un engagement en mairie et souvent religieux. Un temps de l’avant-mariage est alors placé sur le calendrier des vies des amoureux. Un temps de l’attente, où la relation se nuance, un temps où le fol engouement détonateur de la relation de l’un pour l’autre s’estompe et laisse la place à la réalité des choses de la vie. Un temps humain pour suivre et comprendre le biorythme de chacun. Ses enthousiasmes et ses déconvenues, ses obsessions, ses souvenirs d’enfance. L’enfance où se loge la source des émotions incontrôlées, celles qui vont nourrir et enrichir la relation conjugale.

 

Le temps de la découverte

Ce temps de l’avant-vie maritale sert à cela et le temps formel des fiançailles autorise cette familiarité tranquille de l’univers de l’autre. Se connaître dans l’intimité des réactions, des caractères. Parler de ce qui fait dissension et en évaluer les conséquences intérieures profondes. L’un et l’autre s’essaient à explorer ce qui bouleverse, dérange, fait mal jusqu’à parvenir à la compréhension la plus fine qui soit accessible aux deux. Sans illusion, les émotions les plus déstabilisatrices viendront régulièrement vérifier la solidité de la relation et les contenir serait une erreur. Rien n’est encore joué. La prise de distance géographique va de soi, les relations avec les amis de chacun sont entretenues, la chambre, la salle de bains et encore moins l’habitat ne sont partagés au quotidien. Se contenter des moments de rendez-vous et de la joie de la rencontre furtive donnerait une image tronquée de la relation conjugale à venir. Pouvoir se remémorer ce temps insouciant des fiançailles rend conscient le lien fondateur qui unit le couple.

Guylène Dubois
Directrice de Radio FM+ – Montpellier

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