Entre abandon et solidarité
Stagiaire à l’Entraide protestante de Nice, dans le cadre de ses études de théologie (université de Strasbourg), Gundula habite la Roya depuis longtemps. Elle témoigne ici de l’« après Alex ».
Quand j’ai quitté la petite équipe de l’Entraide protestante de Nice, comme tous les jeudis soir, pour retrouver mon domicile dans les montagnes de la Haute-Roya, j’étais loin d’imaginer ne pas pouvoir revenir pendant les mois suivants. Et encore plus loin d’imaginer me trouver dans la file d’attente de l’aide alimentaire, quelques jours plus tard - comme tous les gens de mon village, comme toute la vallée de la Roya.
Car le lendemain, le 2 octobre, la tempête Alex s’abattait sur l’arrière-pays niçois, laissant derrière elle une vallée ravagée et coupée du monde extérieur : des routes, ponts et une partie du réseau ferroviaire détruits, des villages coupés en deux, des hameaux inaccessibles et des sites naturels (qui constituaient une grande partie de l’économie de la vallée) défigurés à jamais. Neuf personnes ont perdu la vie et le bilan n’est toujours pas définitif.
Un quotidien très impacté
Un élan de solidarité s’engage à travers toute la France, mais la plus grande difficulté se trouve dans l’acheminement des dons et des bénévoles ; la voie aérienne reste souvent la seule issue. Grâce à cette obstination certainement un peu typique des gens de la montagne, et à une capacité d’adaptation aux situations extrêmes, la vie se réorganise dans les villages, surtout autour d’initiatives individuelles et collectives « officieuses », certaines mairies étant débordées face à la situation.
Trois mois après la catastrophe, le quotidien est toujours difficile, avec les conditions hivernales qui s’ajoutent (ne parlons même pas des nouvelles restrictions covid), et un certain sentiment d’abandon même si une piste provisoire permet maintenant de relier la vallée enclavée avec la côte, à certaines heures de la journée.
Migration solidaire
Des centaines de personnes ont déjà quitté la vallée, mais d’autres sont venues, attirées par cette possibilité « d’une autre reconstruction », peut-être plus solidaire, plus écologique. Cette vallée de la Roya connue des médias par l’afflux et l’accueil des migrants, va donc connaître les premiers « migrants climatiques » de la France.
Gundula Walter
Étudiante en reconversion professionnelle